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Dojd : une Web TV qui donne la parole au peuple russe

Parmi les médias russes, seule la petite télévision Dojd, lancée sur le Web en avril 2010, couvre les différentes manifestations anti-Poutine suite aux élections législatives du 4 décembre dernier. Une fenêtre ouverte pour le peuple face aux chaînes traditionnelles de l’État contrôlées et censurées.

Nouvelle technologie = liberté de parole ? C’est ce qui semble être le cas en Russie depuis la victoire du parti de Vladimir Poutine aux législatives le 4 décembre dernier. Suivie uniquement par la télévision russe Dojd, la manifestation du 10 décembre pour dénoncer les fraudes pendant les élections a été retransmise pendant près de trois heures.

"Pas de voix". Manifestation à Saint-Petersbourg le 10 décembre 2011 (Quoi.info/Reuters).

Seule contre tous

Dojd, a contrario des principales chaînes sous contrôle de l’État qui ont couvert les manifestations a minima, a diffusé de nombreux débats politiques en plus des protestations sur le thème de « Les élections qui nous ont changés« . Disponible depuis peu par satellite, cette Web Tv a conquis les spectateurs : l’audience a été multipliée par cinq dans la semaine des législatives. Malgré cela, Dojd n’est pas une chaîne militante mais indépendante. « Nous invitons et l’opposition et Russie Unie (le parti au pouvoir), c’est comme ça que toutes les chaînes devraient fonctionner », relève-t-il. « Nous voulons que la Russie soit un pays normal, libre et démocratique »(AFP).
« Une chaîne optimiste », tel est son slogan, qui cultive cette originalité afin de se différencier des concurrents. « Notre but était de créer une télé pour les gens qui sont fatigués de la télé, qui ne regardent pas les chaînes habituelles », explique le rédacteur en chef, Mikhaïl Zygar. Des spectateurs lassés de voir des chaînes de télévision qui ne rapportent que les faits et gestes du Premier ministre Vladimir Poutine et du Président Dmitri Medvedev, une Web Tv pour éviter la propagande.

Une Web Tv libre de tout propos, mais à quel prix ?

Face à l’arrivée des présidentielles en mars 2012, Djod est menacé. Vladimir Poutine souhaite revenir au pouvoir. « Ils prennent un vrai risque », relève Arina Borodina, journaliste spécialisée dans les médias au quotidien Kommersant. « Depuis les élections, (Dojd) est devenu très populaire, elle a gagné la confiance des spectateurs et j’ai peur que quelque chose ne lui arrive désormais » (AFP). D’autant plus que plusieurs journalistes russes ont déjà été privés de leur fonction pour leur couverture des législatives.
Pavel Lobkov, un reporter de la chaîne de la télévision russe NTV a été limogé mardi dernier à la suite d’un reportage effectué sur les fraudes pendant les législatives. La chaîne a mis fin à son contrat après les faits et a bloqué son téléphone portable.
Echo de Moscou, une radio d’opposition, est aussi dans le collimateur du pouvoir. Vladimir Poutine s’en est pris au rédacteur en chef Alexei Venediktov en l’accusant publiquement de l’insulter et de servir les pays étrangers (Reuters).

Le Web comme échappatoire

La liberté d’expression se relève donc dangereuse dans un pays contrôlé par l’État. Djod se met en danger. Mais la censure reste plus difficile sur la toile. Le principe de la Web Tv (uniquement diffusible sur internet) permet de s’adresser à tous et de laisser tout le monde s’exprimer. C’est ce qui fait le succès et la longévité de Djod. Les nouvelles technologies sont une nouvelle forme de liberté d’expression, une ouverture sur le monde. Grâce au Web, les barrières de l’État sont repoussées.
La révolte russe se fait aussi sur le net. Effectivement, Facebook et vKontakte ont permis la mobilisation des manifestants. De nombreux blogs d’activistes naissent également depuis 2008.
Les réseaux sociaux restent essentiels dans ces montées de colère. Un événement similaire a eu lieu en Hongrie depuis le 1er Janvier 2012. Une réforme très contestée des médias à été mise en place : les réseaux sociaux se sont tout de suite révoltés pour soutenir les médias hongrois (voir l’article Le journalisme hongrois en péril). Et n’oublions pas le rôle qu’ils ont joué dans les révolutions arabes.